Romane à la Somme, Tatamo et Christopher à la Robertsau ; ils vivent en résidence universitaire et, par choix ou nécessité, y passent le confinement. Ils racontent cette expérience de vie, entre espace restreint, promiscuité et solidarité.
« Confiné dans 9 m2 » : ma vie d'étudiant en cité U
Romane à la Somme : un témoignage à écouter
Romane est étudiante en licence 3 Langues étrangères appliquées Russe-Anglais. Très déçue par l’annulation de son stage de fin d’études, elle nous raconte comme elle réorganise son quotidien. Elle qui avait plutôt l’habitude de prendre ses repas au Crous s’est par exemple mise à la cuisine…
Bon à savoir
Le rôle clé des étudiants relais
Les étudiants témoignant dans cet article sont tous étudiants relais cité. Une mission de lien dans les résidences universitaires, à ne pas confondre avec les étudiants relais campus !
Etudiants relais cité
Comme l’explique Romane, « on fait le lien entre les étudiants et l’administration ». Les étudiants relais cité ont aussi un rôle d’animation, donc de lien social, dans leur résidence. Ils favorisent l’intégration des étudiants de la résidence universitaire au sein de leur lieu de vie, de la cité et de la ville. Les neuf résidences du Crous de Strasbourg comptent aujourd’hui quatorze étudiants relais, recrutés par le service social et eux-mêmes résidents depuis au moins un an. Leurs coordonnées sont à retrouver sur la fiche de chaque logement universitaire, sur le site du Crous.
Etudiants relais campus
Identifier les étudiants en difficulté - scolaire, financière, psychologique – et les orienter vers les bons interlocuteurs. Un peu comme des boussoles. Clémence nous présentait son rôle en 2016. Les étudiants relais campus Rescue, dont le rôle est de répondre aux étudiants en difficulté, aller à leur rencontre, les écouter, les informer et les orienter, restent joignables par courriel pendant le confinement.
Découvrez les étudiants relais en vidéo
A la cité U de la Robertsau, confinés mais solidaires !
Tatamo est en 4e année de pharmacie ; Christopher en 2e année de licence en droit.
Quelle est la situation vis-à-vis de vos cours ? Quelles sont vos craintes, vos angoisses ?
Tatamo. J’ai la chance d’avoir des enseignants impliqués, même si la majorité d’entre eux sont des professionnels de santé très pris en cette période. Ils arrivent tout de même à déléguer leurs enseignements. On est plus ou moins à jour, et l'enchaînement logique des cours est maintenu au maximum. On ne reçoit pas tout en un bloc comme cela pourrait être le cas dans d’autres filières. Mes craintes portent surtout sur la validation de l’année. La quatrième année est assez chargée entre les examens, les stages, la grande épreuve tant redoutée du Certificat de synthèse pharmaceutique (CSP)… A l’heure actuelle, tout ce qu’on sait c’est que les dates seront maintenues, que les examens se passent en ligne et que les modalités (la forme et le contenu) seront adaptées à la situation. On continue donc les révisions comme on peut, en attendant les annonces officielles.
Christopher. Les cours se sont terminés fin mars. Les contrôles continus ont ensuite été faits en ligne, avec beaucoup de difficultés certes mais nous devions nous adapter à la situation exceptionnelle. Certains enseignants ont eu à nous envoyer la suite des cours en ligne et certains d’entre eux se sont limités à ce que nous avions vu en cours avant le confinement. Je m’inquiète surtout par rapport à la tenue des épreuves terminales du second semestre. Le doyen et les professeurs essaient de trouver un terrain d’entente en envisageant des épreuves en présentiel au courant du mois de juin et des rattrapages début juillet. Les modalités n’ont pas encore été arrêtées.
Comment organisez-vous votre temps ?
T. Ce n’est pas trop un problème pour moi. J’imagine que tout étudiant passé par la Paces a l’habitude du mois « bloqué » pour se consacrer aux révisions ! Je me suis fait un planning conciliant les cours, le travail d’étudiant relais et les moments de détente (films, séries, etc.). C’est très important pour ne pas céder à l’anxiété. Le challenge est maintenant de s’y tenir. Mes journées commencent vers 10-11 h, chose qui aurait été impossible en temps normal (c’est peut-être un des points positifs de ce confinement). L’après-midi, pour une heure ou deux, on revêt la casquette étudiant relais. A l’heure du dîner, c’est le moment des appels vidéo à la famille (8 000 km de distance obligent). Ils me donnent des idées de recettes et on fait nos petits plats « ensemble » (la cuisine : une activité que je ne faisais pas jusqu’à présent). Je suis logée en studio (la kitchenette est à l’intérieur) donc il n’y a pas le souci des cuisines communes, etc. Mais ce n’est peut-être pas le cas de ceux qui sont logés en chambre.
Je fais partie de la team « anniversaire en confinement », d’ailleurs je remercie la belle équipe des étudiants relais de la Robertsau, un petit rayon de soleil, qui m’ont confectionné un cadeau avec les moyens du bord !
C. Je suis logé dans une chambre de 9 m², la cuisine est commune, et je mange habituellement dans ma chambre. La première semaine j’avais du mal à m’organiser, mais à la deuxième, j’ai essayé de faire de mon mieux pour passer au moins deux heures de révisions en journée et deux dans la nuit. Le plus dur je pense c’est d’arriver à se concentrer, s’accorder une discipline. Je considère cela presque comme une opportunité de travailler comme étudiant relais, pour m’occuper en journée. Je fais un peu de sport, je lis aussi quand j’en ai l’occasion mais je m’occupe surtout avec mes séries, en suivant des débats télévisés et quelques émissions sportives. Un point positif : pouvoir se concentrer sur les projets personnels. J’envisage de faire des études de banque, et grâce à ce temps libre, j’ai pu structurer mon projet : postuler pour décrocher une alternance. Aujourd’hui, j’ai eu une réponse et je vais passer un test en attendant de passer mon entretien dans les jours qui suivent.
Quelle est la situation dans la résidence ?
T. Les premiers jours, il était très difficile de faire comprendre aux résidents que les lieux communs (cafèt', salle de muscu, city stade…) ne seraient pas ouverts sur toute la période et que les regroupements étaient interdits. C’est compréhensible : il est très difficile de rester seul toute la journée dans 9m². Mais maintenant ça commence à se calmer.
C. Dans notre mission d’étudiant relais, comme le porte-à-porte, notre principal outil de travail, a été proscrit, nos seuls moyens de contact avec les résidents sont les mails et les quelques instants que nous passons à discuter avec eux lors de nos distributions des paniers-repas du Crous – une nouvelle mission. Ce n’est pas l’idéal de parler de soucis personnels dans ces conditions, mais on essaie de s’adapter et cela semble fonctionner, pour l’instant. Les acteurs avec lesquels on a l’habitude de travailler restent tous disponibles.
Le rapport humain, central dans notre mission, a beaucoup été réduit : nous devons observer les gestes barrières, il est difficile de venir vers les étudiants pour discuter dans ces conditions. Heureusement il y a beaucoup de solidarité dans notre équipe d’étudiants relais. Merci à mes collègues qui sont aujourd’hui devenus mes amis, cela fait deux ans.
Propos recueillis par Elsa Collobert